Joseph CONSTANS : des "Faucheuses ECLAIR" à la Mairie
Arrive bientôt Joseph CONSTANS, dans les années 1920, CONSTANS qui commence par reprendre l'usine des « faucheuses Eclair », au bord de la faillite, lui assurant de nouveau une activité florissante, qui contribuera à la richesse et à l'entrain de BUZET. Ce ne sera pourtant qu'un sursaut. La sauvage concurrence américaine du milieu des années 1930 achèvera l'entreprise. C'est que les ETATS-UNIS avaient imaginé, pour les faucheuses mécaniques de ce type, des roulements à billes qui réduisaient de beaucoup l'usure et, qui plus était, avait "cassé les prix". C'en était trop pour la "vieille Europe" !
En 1947, après un intermède de trois ans assuré par un certain Augustin PECH, raide professeur d'histoire-géographie désigné par le Gouvernement de la Résistance pour succéder à Emile MASSIO, un PECH qui n'avait jamais vraiment conquis sa légitimité parmi les Buzétois, Joseph CONSTANS devient Maire, pour près de vingt ans.
Pour les Buzétois, cruellement frappés durant l'Occupation, voici venu le temps des restrictions, et ce bien après la Paix. Joseph CONSTANS est donc d'abord celui qui veille à la juste distribution des "tickets de rationnement" et "bons" en tout genre.
"Nous allions à la mairie, se souvient Marc ROUQUIE, chercher les bons de chaussures. La demande se passait autour de la grande table ronde présidée par monsieur le Maire, d'abord M. PECH, puis M. CONSTANS, assistés de M. SEGUR, le garde-champêtre, et de la secrétaire, Mme SEGUR".
Entre autres conséquences des "restrictions", BUZET assiste, en ces temps-là, au spectacle du Maire, conduisant dans sa voiture personnelle "M. le Curé", Pierre BASSEGUY, jusqu'aux croix du village pendant les Rogations. C'est l'une des grandes caractéristiques d'une petite Commune que de savoir, quand nécessaire, ne pas camper sur des principes qui pourraient empêcher d'avancer.
Entre autres "curiosités" des "temps CONSTANS", pour certains en tout cas, voici venues des femmes à la Mairie. Elles viennent s'inscrire sur les listes électorales, depuis qu'en 1944, elles ont obtenu le droit de vote. On aura bien attendu pour tirer les leçons d'Olympe de GOUGES, la Montalbanaise, rédactrice, sous la Révolution, d'une Déclaration des droits de la femme et de a citoyenne qui, guillotinée pour cela, eut, un jour, ce mot: "La femme a le droit de monter sur l'échafaud; elle doit avoir également celui de monter à la Tribune".
Parmi les premières mesures du nouveau Maire, il est encore celle de la légalisation de la chasse, interdite durant la Guerre, et l'on comprend aisément pourquoi on avait alors refusé tout port d'armes Dans la foulée de cette liberté retrouvée, se crée le "Syndicat des propriétaires et chasseurs de BUZET". Entre temps, la pêche, elle aussi un temps prohibée, avait repris sur la Commune, ainsi que les foires agricoles.
Mais, bientôt, une guerre succède à une autre, une "guerre", d'abord, qui ne dit pas son nom, celle d'ALGERIE, puisqu'il faudra attendre... 1999 pour que le Gouvernement de la République reconnaisse ce terme. Douze Buzétois sont mobilisés sut le théâtre des opérations, dont, heureusement, aucun ne périra de la "pacification" ou du "maintien de l'ordre," comme on appelle alors la politique en ces lieux. Mais bientôt tous vont découvrir qu'on leur a "bourré le crâne". Pour ces jeunes d'une vingtaine d'années, qui sont partis entre 1957 et 1960, vivront à jamais dans leur souvenir les classes à RIVESALTES, les uniformes et brodequins datant de "la guerre de 40", la "vomitive" traversée de la MEDITERRANEE, la découverte d'ALGER la blanche, cité accrochée à flanc de roches, le sirocco "qui vous coupe la respiration", les grands domaines des "colons", mais aussi les "colons" petits commerçants ou fonctionnaires, la "ségrégation" d'avec les musulmans, de toutes façons, et puis les attentats, les embuscades, les ponts qui sautent, les angoisses des tours de garde, quand tomber nez-à-nez avec un chacal est une chance, les "corvées de bois", puisque c'était ainsi qu'on appelait la "torture". Certains rentreront blessés, d'autres efflanqués (perdre huit à dix kilos n'était pas rare), et même victimes du scorbut, tant la nourriture était ... fort peu équilibrée.

Image extraite de l'ouvrage de Marc ROUQUIE TRENTE ANS D'HISTOIRE D'UN VILLAGE OCCITAN. BUZET-SUR-TARN
A BUZET, le dimanche 5 mars 1963, lors d'une cérémonie officielle présidée par Joseph CONSTANS, André RIGAL, ancien combattant 1939-1945 en AFRIQUE du NORD remet la croix de combattant aux jeunes du village qui sont revenus sains et saufs de l'enfer : René CASSE, Raymond DELL'OVA, René FLORENTIN, Michel LORMIERES, Fernand NICHELE, Claude PLANTADE, Jean PLANARD, André et Raymond PRUNET, René TEGON, Yves TURROQUES et José VAQUIE.
Entre autres conséquences de la fin de la Guerre d'ALGERIE, voici qu'arrivent à BUZET, et ailleurs, les "rapatriés", ou "pieds-noirs", dans l'administration ou, surtout, dans le commerce. Bernard-Loïc CALLEJA s'installe ainsi à BUZET, sur les terres céréalières du château de CONQUES et, aux pieds des coteaux, fait pousser des arbres fruitiers, pommiers surtout, secondé par son ancien personnel musulman. BUZET, qui vient peut-être de "buse" en arabe, bouclerait-il la boucle, d'une certaine manière?
Si 1962 est l'année de la fin de la Guerre d'ALGERIE, c'est aussi, à BUZET, celle du feu, feu de forêt, feu de la forêt de BUZET, le 12 juin. Joseph CONSTANS sera un des premiers à la forêt, victime d'un incendie d'origine inconnue. Constatant rapidement que n'y feraient rien les lances des pompiers et les seaux des villageois de BUZET et des alentours, il est alors décidé de faire des "coupe-feu". Pour faire "mourir de faim" le feu, on abat des arbres. de nombreux chênes centenaires périront donc, des flammes ou pour sauver des flammes.

La vieille Halle, avec l ancienne Mairie
En 1955 enfin, Joseph CONSTANS avait inauguré le nouveau pont de BUZET. Depuis la fin du pont "historique", dont il restait quelques "piles", un bac l'avait remplacé pour relier les deux rives du TARN, puis on avait entrepris de bâtir un nouveau pont avant que celui-ci ne soit victime des inondations de 1930. Après ce désastre naturel, il était devenu urgent de sécuriser le passage. Joseph CONSTANS et son Conseil avaient décidé qu'un nouveau pont serait construit.
Ce jour de cérémonie, étaient là le Ministre de l'Intérieur, Maurice BOURGES-MAUNOURY, alors également Député de la HAUTE-GARONNE, Conseiller général du canton de MONTASTRUC, futur Président du Conseil des Ministres et futur Maire de BESSIERES, et le Président du Conseil général, Léon EeCKHOUTTE, Maire de VILLEMUR par ailleurs. L'ambiance avait été glaciale, car, d'abord, certains regrettaient la démolition du pont précédent, le "pont SEGUIN", synonyme de tant de leurs souvenirs. N'aurait-on pu le rénover?, avaient-ils dit. Ce "pont Seguin avait un gros inconvénient: il n'était qu'à une voie, il en serait sûrement autrement du nouveau. Et, finalement, ce ne fut pas le cas. L'Etat n'avait pas mis un sou, et, par manque de moyens, le pont ne permettrait toujours pas la circulation des véhicules à double sens. Et puis BESSIERES, elle, avait aussi un nouveau pont, à double voie, lui! L'ingénieur en chef des Ponts-et-Chaussées répondit que, si BUZET perdait en largeur, il gagnait en longueur, par rapport à BESSIERES! D'autres esprits chagrins rappelaient encore que peu d'ouvriers de BUZET avaient été embauchés sur le chantier.
Cependant, le discours de BOURGES-MAUNOURY est très bien écrit et mérite d'être cité. La Commune et son histoire lui ont-elles suggéré ses mots, à défaut de l'inciter à mettre la main au portefeuille ?